Le fric, c’est chicK ! ( Chez les Anges – M. Keyes )

En toutes saisons,  j’aime mettre le neurone en veilleuse et bouquiner des trucs pas prise de tête.
Je vous avais déjà présenté le premier roman que j’ai lu de Marian Keyes, une lecture que j’avais kiffé au point de m’en acheter un deuxième dans la foulée : «Chez les anges», à ne pas confondre avec l’Empire des Anges de Bernard Werber.

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La chick lit ( littérature pour poulettes ) est un genre littéraire relativement neuf puisqu’il est apparu en 1996 après la parution de SEX AND THE CITY de Candace Bushnell, immédiatement suivi par les parutions d’ Helen Fielding ( LE JOURNAL DE BRIDGET JONES entre autres ), de Lauren Weisberger ( LE DIABLE S’HABILLE EN PRADA ) et de dizaines d’autres auteures.
En plus d’être faciles à lire et donc digestes ( pas comme mon pavé «les Bienveillantes» qui mord la poussière ), on retrouve plusieurs éléments communs aux chicklits :

  • Une ou des héroïnes jeunes et citadines : une mamie de 72 balais qui habite à Ploermel n’aura aucune chance de devenir la star d’un bouquin du genre.
  • Des addictions diverses et variées : alcool, fêtes, achat compulsif de fringues et/ou de cosmétos.
  • Un job souvent harassant et tournée vers les médias : télé, journaux, publicités… avec un chef beau gosse mais souvent très con.
  • Il y a souvent des histoires de mecs mais les pans familiaux ( en particulier la mère chiante ou le frangin tordu ) et amicaux sont tout aussi importants voire plus.
  • L’ humour est quasi omniprésent mais pas sous forme de blagues potaches, plutôt dans la manière de narrer et de décrire des situations en total désaccord avec les sentiments des protagonistes.

J’adore dévorer un chicklit quand mon moral est en berne bien calée sous ma couette  ou sous un cocotier enduite de Monoï avec les orteils dans le sable. Les histoires sont souvent fraîches et les personnages tellement attachants qu’on dévore les centaines de pages en quelques heures seulement.
En clair , la Chick lit est un genre qui ne prend pas la têtele style de roman qu’on lit vraiment par pur plaisir sans risque de sursauter dans son plumard au moindre bruit suspect dans l’appart.Si LE JOURNAL DE BRIDGET JONES, best-seller adapté sur grand écran fut ma première lecture du genre, l’avis de Lolotte031 sur UNE VIE DE REVE m’a totalement convaincue de me pencher sur le cas Marian Keyes. Je l’ai dévoré et adoré et j’ai ensuite boulotté CHEZ LES ANGES en moins de deux, et me suis cassée le nez sur REPONDS SI TU M’ENTENDS ….

Je passe rapidement sur l’exil choisi de certaines pouffes au Danemark – pays réputé très chaud – pour me focaliser sur les origines de la chicklit.
Dans le cerveau du commun des mortelles, ce genre de romans est d’origine britannique. Marian Keyes, jolie brune proche de la cinquantaine, ne déroge pas à la règle puisqu’elle est irlandaise mais pas une irlandaise née de la dernière pluie. En effet, elle est considérée comme l’ une des pionnières de la Chick lit en ayant publié dès 1996 comme sa consoeur américaine Candace Bushnell.
Aujourd’hui, cette auteure à succès peut se targuer d’avoir vendu plus de 10 millions de livres traduits dans 30 langues différentes !

Parmi ses romans les plus connus, on peut citer :

  • LES VACANCES DE RACHEL ( 1998 )
  • LE CLUB DE LA DERNIERE CHANCE ( 1999 ) porté à l’écran en 2004 par Marie-Anne Chazel sous le titre «Au secours j’ai 30 ans»
  • UNE VIE DE REVE ( 2000 )
  • CHEZ LES ANGES ( 2004 ) – sujet de ce billet
  • REPONDS SI TU M’ENTENDS ( 2008 )

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Et là je me demande si le syndrôme Psychosexien ne m’a pas atteinte : j’ai fait exprès d’acheter mon bouquin aux éditions Pocket et ceci dans un seul but : que mes romans de Marian Keyes soient bien alignés sur mon étagère et qu’aucun ne dépasse l’autre d’un poil de fesse…Gasp.

Contrairement à son congénère UNE VIE DE REVE paru chez Pocket aussi, ce bouquin de 344 pages présente une première de couv’ dessinée par une Penelope Bagieu que ça ne m’étonnerait pas : on y voit deux gonzesses archiminces étalées comme des larves sur des serviettes de plage, dont l’une a un bronzage carrément abusé. En plus elle est blonde, je vous explique pas le contraste. Sauf qu’ après lecture du pavé, on se dit que Carlotta ( ah ben non c’est pas Penelope ) aurait pu forcer un peu plus les traits de l’autre nana : je l’imaginais plus grosse, pulpeuse quoi et les deux petits traits de crayon qui veulent faire penser qu’elle a un bon popotin des familles ne suffisent pas à me faire gober qu’il s’agit d’une touriste irlandaise un peu rondelette blanche comme un cul.

Mais bon je ne vais pas tout vous raconter maintenant…En tout cas si vous pensiez passer inaperçue sur la plage avec le bouquin entre les mains ou pire, que vous vouliez faire gober au premier beau gosse bronzé qui passe que vous êtes une intellectuelle, c’est foutu : la première de couv’ fait mal aux yeux tant elle est colorée et flashouille.

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La quatrième de couverture quant à elle, a été rédigée par C.C, du journal Nice Matin .
Je sais pas vous mais moi je connais Féfé mais pas C.C ! Crétin Couillu ? Chaude Crevette ?
En tout cas si j’avais jeté la pierre sur le journaliste mâle de l’ Echo qui avait écrit un synopsis foireux sur UNE VIE DE REVE, on ne peut pas en dire autant de C.C pour CHEZ LES ANGES. Franchement il ( elle? ) aurait dû signer de son vrai nom parce que pour le coup, j’ai vraiment l’impression que le journaliste a lu le bouquin et n’a pas fumé un gros splif avant de faire son résumé.
C’est après avoir dévoré le bouquin que j’ai finalement trouvé que C.C dressait vraiment un tableau un peu extrême de la situation quand même..

L’histoire est comme tout bon livre de Oui-oui : accessible au grand public même aux blondes ayant le QI d’une moule. Ca tombe bien, c’est ce qu’on retrouve en grande proportion en train de bouquiner sur les plages, gniark gniark !
Maggie Walsh est une trentenaire irlandaise qui vit à Dublin, qui se fait lâchement planter par son mari et qui se fait virer de sa boîte du jour au lendemain.
Elle décide sur un coup de tête de rejoindre sa copine Emily à l’autre bout de la Terre, là où tout semble rose, plein de paillettes et de thunes. D’abord pour se ressourcer mais surtout pour réfléchir sur son avenir. En plus c’est des vacances gratos tant qu’à faire hein.

Donc au début, nous n’en savons que très peu sur Maggie, mis à part que comme dans tout chicklit, elle est entourée d’ une famille pas très très normaleet que son mari a décidé de la tromper avec celle que Maggie appellera gentiment «la Truffe». Son homme, ou plutôt son ex, s’appelle Garv. Et ouais. Comme dans tout roman de Marian Keyes, c’est encore une fois prouvé : les héros irlandais ont des prénoms de chiotte.

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EXTRAIT n°1 : Quand Maggie découvre l’infidélité de son époux…
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Il m’a aidée à ranger les courses et a sorti cette maudite boîte de truffes.
– Eh bien ! On dirait que ces chocolats nous suivent à la trace !
J’ai regardé Garv, la boîte et de nouveau Garv, sans comprendre.
– Mais tu sais bien ! a-t-il insisté, malicieux. Ce sont les mêmes que le jour où on a…
Il s’est interrompu. Je l’observais, toujours curieuse. Tout à coup, l’espièglerie dans son regard à fait place à l’horreur. Et j’ai compris qu’il parlait d’une autre femme et d’un moment d’intimité qu’ils avaient dû partager récemment.

SUSPENSE ! *
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Vous avez donc remarqué que le récit est narré à la première personne, ce qui permet de pénétrer facilement les pensées profondes du personnage principal.
Ensuite Maggie lourde sa famille de dégénérés et part retrouver sa meilleure amie Emily, scénariste en mal de reconnaissance ( et de pognon ) dans la Cité des Anges. Elle découvrira un autre mode de vie et une culture floridienne qui semble s’articuler plus autour des nouvelles coupes de cheveux tendance et des dernières technologies en matière de chirurgie plastique plutôt qu’à la véritable essence du 7ème Art. Maggie fera connaissance avec les amis d’Emily, très ecclectiques, ses voisins un peu barrés, une coiffeuse absolument énorme, des relations de futur-travail et de potentiels amants.
Je ne peux pas présenter tous les protagonistes au risque de vous embrouiller ( on en compte une bonne vingtaine en incluant toutes les soeurs de Maggie ).

Maggie : irlandaise en mal de vacances, un peu potelée mais pas beaucoup, pas très moche, assez banale mais ouverte à de nouvelles expériences à L.A

Emily : irlandaise exilée à L.A, scénariste qui se fait voler ses bons travaux, assez portée sur la boisson. Petite et menue pouffette, elle parvient sans peine à se mettre en valeur. Sans doute mon personnage préféré tant ses attitudes et comportements sont comparables aux miens ^^

Shay : irlandais travaillant sporadiquement à L.A. Il fut le premier amour de Maggie, et elle le retrouvera «par hasard» lors d’une soirée chic.

Troy : ( ouais comme le docteur canon dans Nip Tuck graaaaa ! )l’américain tombeur par excellence. Bourré de charme et changeant de nana comme de slip, il n’hésitera pas à aller butiner du côté de Maggie mais semble entretenir une relation assez étrange avec Emily qu’il connaît depuis des années…

Lara : le cliché de l’américaine trop bien gaulée : de longs cheveux brillants, une peau bronzée, une silhouette parfaite. On ne peut même pas la traiter mentalement de grosse pétasse tant elle est gentille. Ah oui j’ai failli oublier : elle est lesbienne.
La première partie du roman, assez courte au demeurant, se situe dans la triste et pluvieuse Dublin. On comprend que Maggie déprime et veuille se casser.
La seconde partie devient alors plus funky : dès lors que Maggie déplie pour la première fois sa serviette de plage sur le sable fin des côtes californiennes et qu’elle se sent comme une chanson de Stone et Charden dans une soirée disco ( = ringarde à mort ) on prédit que l’on risque de se régaler.

Elle va donc tenter de se dérider , tant au niveau physique que sexuel … tout en n’oubliant pas sa situation actuelle archibancale et son mal-être qui larve au fond d’elle .

Si vous vous souvenez bien, Marian Keyes nous avait livré un récit à la première personne dans son roman UNE VIE DE REVE et changeait régulièrement de narrateur, ce qui m’avait vraiment charmée, tant par la facilité avec laquelle l’auteur swichait d’un personnage à un autre que par les rires que déclenchaient la découverte de points de vue différents sur une même situation.

Dans CHEZ LES ANGES , c’est pas vraiment qu’on s’emmerde , mais presque .
C’est beaucoup plus lent et le rythme est beaucoup moins soutenu puisque le narrateur ne change pas. C’est Maggie au début, au milieu et à la fin. Doncniveau humoristiqueon reste quand même pas mal limité même si certaines situations restent cocasses.

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EXTRAIT n°2 : Flashback dans la tête de Maggie qui se souvient avoir passé quelques jours avec sa soeur Claire enceinte jusqu’aux dents…

Son bonheur me réjouissait, mais la vue de son énorme ventre veiné de bleu a provoqué en moi un léger dégoût. Cela dit, côtoyer une femme enceinte, c’est avoir la certitude de ne pas mourir de faim. (…) Puis nous nous sommes allongées pour regarder la télé. Claire a retiré son sweat-shirt. Pourquoi se serait-elle gênée devant moi? C’était ma soeur et elle était chez elle. Mais j’ai presque regretté l’époque victorienne où modestie et pudeur étaient de mise quand j’ai dû me dévisser la tête pour regarder le film par-dessus son gros ventre. Si ça avait été sous-titré je n’aurais rien compris.
– Je n’aurais pas dû manger ce second Bounty, le bébé va avoir le hoquet, a soudain dit Claire tendrement.
Et en effet, devant mes yeux écarquillés, son ventre a été agité de petits rebonds.
– Tu veux sentir?
J’en avais autant envie que mettre ma main dans un hachoir à viande.
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Cependant l’avantage indéniable du récit à la première personnec’est que l’histoire globale est beaucoup plus fouillée . On ne lit pas des dizaines de pages de séances de shopping entre copines, on reste quand même raisonnable donc accessible, et il est beaucoup plus facile de s’identifier à Maggie.
Parallèlement au fur et à mesure qu’on avance dans le roman, Maggie nous en dévoile un peu plus sur son passé. A grands renforts de flash-backs , on cerne mieux les raisons de la rupture dans son couple . Les indices sont d’ailleurs fort bien disséminés tout au long des pages, ce qui rend ce chicklit assez passionnant à lire, contrairement à ses homologues du même genre quand même vachement plus tournés sur les Jimmy Choo, les fringues, les cosmétos hors-de-prix et les sorties branchouilles.
Bon il y en a aussi dans ce romain hein. Après tout, on est à Los Angeles, patrie du paraître et du moi-je . Pour le coup, ce roman ne donne pas vraiment envie d’y mettre les pieds ( pourtant j’en ai eu l’occasion ) tant la superficialité des relations spécialement avec Lara et Troy , les deux américains les plus marquants de l’histoire, est dérangeante. Mais je suppute que c’est assez conforme à la réalité, un bon point pour Marian Keyes !

Malheureusement si vous trouvez que 350 pages sont suffisantes pour un roman de chicklit, je ne trouve pas que ce soit le cas pour CHEZ LES ANGES
En effet malgré l’enthousiasme qu’a provoqué en moi cette intrigue psychologique cachée derrière la superficialité, je trouve que le tout manque de profondeur et méritait d’être beaucoup mieux exploité.
Soit on fait de la psychologie, de la vraie, soit on n’en fait pas du tout. Mais de la psycho de supermarché, là je dis non. Par exemple, j’ai trouvé la manière dont Maggie se tourne vers les femmes ( oui bon j’en révèle un peu et alors ) traitée bien trop légèrement. Un peu comme si je me disais un jour « tiens et si je me casais avec une nana?» et que je le faisais direct dans la foulée, sans y avoir réfléchi avant.
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Ce deuxième roman que j’ai lu de Marian Keyes me laisse sur ma faim : une bonne idée que d’insérer une véritable intrigue psychologique au milieu des froufrous floridiens mais malheureusement la psychologie de bas-étage , mal exploitée et servie comme un cheveu sur la soupe , je n’ adhère pas vraiment.

De plus le ressort comique facilement décelé dans d’autres chicklits est beaucoup moins présent dans CHEZ LES ANGESceci à cause d’un récit à la première personne beaucoup moins kiffant qu’un point de vue omniscient .

Du coup on se demande ce qu’a voulu nous offrir son auteure : un véritable roman de chicklit qui s’assume , genre godasses et grognasses à gogo ?Ou plutôt une espèce d’essai sur les traumatismes et leurs conséquences sur une pré-trentenaire en pleine crise existentielle?

Cependant ce livre reste une lecture agréable , sans prise de chou , qu’on dévore facilement en quelques heures sous un chaud soleil d’étéMais il manque quelque chose pour en faire un bouquin à la hauteur : soit plus de superficialité , soit plus de profondeurmais bordel Marian il faut faire un choix !

Satisfaction : 5 / 10

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