Toujours avides de voyages mais chroniquement fauchées , c’est avec beaucoup d’excitation que ma meilleure amie et moi avions dégôté un périple de 10 jours en car au mois d’août 2009 . Pour 300 euros chacune , nous avons ainsi découvert la richesse culturelle de la République Tchèque en visitant la belle ville de Prague puis notre car nous a brinquebalées jusqu’à Budapest , capitale Hongroise . Pour ce prix dérisoire notez que tous nos déplacements , nos nuits d’hôtel et nos petits-déjeuners étaient inclus .
Si la gastronomie tchèque est réputée lourde et copieuse, l’ U Zlatého Tygra ou « Au Tigre Doré » en français ne déroge pas à la règle . Avec mon amie, la découverte des arts culinaires – et des breuvages – de chaque pays visité fait partie de nos priorités et c’est avec notre Guide du Petit Futé sous le bras que nous entreprîmes de goûter aux spécialités tchèques en alternant avec certains repas moins copieux.
L’U Zlatého Tygra est une véritable brasserie traditionnelle produisant son propre houblon ( la Plzen ) qui nous laissera sans doute un souvenir impérissable .
Cette brasserie est située à quelques dizaines de mètres de la place de la Vieille Ville, l’endroit sans doute le plus touristique de la capitale tchèque.
Vous la trouverez très facilement si vous êtes muni d’un plan des petites ruelles entourant la place.
Vous ne pourrez pas rater son entrée : en effet, pour pénétrer la brasserie, il faudra passer sous une voûte datant du XIIIème siècle. Et y’en a pas quinze mille à la ronde.
On est à 2 minutes chrono du bourdonnement touristique permanent de la place de la Vieille Ville , une situation parfaite !
Il faut oser pénétrer le Tigre Doré ( aheum ) et vous comprendrez bien vite que ce n’est pas chose aisée…
Tout d’abord, il faudra prendre son courage à deux mains pour oser entrer dans la brasserie. La voûte d’entrée est méga-impressionnante et les clameurs émanant de l’endroit depuis la rue peut vous laisser penser qu’un touriste n’a pas sa place ici ( ce qui n’est pas tout à fait faux ^^ )
Mais le Petit Futé semble vraiment insister dans ses quelques lignes consacrées au Tigre Doré… Il FAUT oser sinon on n’est que des lopettes.
En effet, vous ne trouverez pas plus typique que cette brasserie : elle est envahie de Pragois qui s’y retrouvent pendant leurs pauses ou après leur travail.
Vous y croiserez des hommes en bleu de travail, des jeunes couples buvant leurs binouzes comme un bébé boirait son lait, mais aussi de grandes tablées de fans de foot ou simplement d’amis venus tremper leurs lèvres dans la mousse. Et on n’entend pas un mot anglais ou français, juste le charabia tchèque local ^^
Autant dire que dès le seuil d’entrée passé, on a compris qu’on détonnait dans le paysage : tous les regards se braquèrent sur nous. Je n’avais pourtant pas mis de décolleté ni de jupe ras-le-persil. Traduction : on n’était super à l’aise avec ces dizaines d’yeux inquisiteurs…
Le serveur qui ne parlait ni français ni anglais, nous fit comprendre à l’aide de grands gestes et regards appuyés que la brasserie était pleine. Effectivement, les grandes tables de bois et les bancs étaient tous occupés.
Nous fîmes demi-tour en pensant retenter notre chance le lendemain soir (quand on a une idée dans le crâne hein …)
Le deuxième jour, vers 20h soit une heure plus tôt que notre précédente tentative, il fut de nouveau impossible de nous trouver une place à table.
Bien décidées à pouvoir prendre place dans cet endroit bruyant et enfumé (oui c’est à se demander si on n’est pas maso, mais si le Petit Futé dit que c’est un must alors on veut nous aussi paraître futées ) , nous rententâmes notre chance le dernier jour de notre voyage et j’insistai auprès de mon amie pour que nous nous y rendions pour 17h pétantes ! L’heure du goûter chez nous avec nos grosses tartines de Nutella et notre café, l’heure du malt chez nos voisins tchèques..
Ô joie ! A 17 heures, la brasserie était déjà pleine à craquer mais le serveur nous fit coulisser ( serrés comme des sardines j’vous dis ! ) entre un couple de jeunes tchèques qui parlaient excessivement fort et une tablée d’amis soixantenaires qui n’en étaient visiblement pas à leur première binouze ^^
L’endroit est typique, c’est indéniable de par sa fréquentation mais aussi par la décoration qui amène chaleur et décontraction à l’endroit .
Les tables sont très longues et faites de bois solide. Vous poserez votre séant soit sur un banc, soit sur une banquette de bois si vous êtes accolé au mur. Comme je suis une fourbe, j’ai immédiatement investi la banquette en laissant le soin à ma copine de se ruiner le fessier sur les chaises. Mais au bout de quelques heures, elle n’a pas même pas pigné, signe que les chaises sont confortables.
Dans une pièce jouxtant la nôtre, une seconde salle beaucoup plus petite et donc plus intimiste accueillait 2 autres grandes tablées.
La cuisine et les toilettes sont accessibles au fond du restaurant en traversant la salle plus petite.
Au niveau décoration, on comprend vite que le football est un sport national à Prague ! Au mur, vieux posters et affiches de l’équipe nationale côtoient des objets en bois d’époque et des photos dédicacées du personnel de la brasserie entouré de grands noms tchèques. Vous n’échapperez pas non plus aux clichés d’Antonin Panenka, ce footballeur tchécoslovaque qui donna son nom au célèbre penalty tiré tout en douceur dont Zinedine Zidane fit une brillante démonstration lors de la finale des championnats du Monde 2006 🙂
Au final : mobilier en bois robuste, lumières pas agressives, énorme fût de bière au bar….Tout cela me rappelle des endroits de campagne que j’aime fréquenter justement pour cette ambiance « vraie » et bon enfant ( hips ).
Je pense ne JAMAIS retrouver le service reçu au Tigre Doré en France ! Et pour cause…
Tout d’abord, il faut avouer que les serveurs sont assez impressionnants : pas spécialement souriants, assez charismatiques et très baraqués, ils ne comprennent pas vraiment l’anglais malgré la présence de la traduction anglaise de la carte au dos du menu…
Ensuite, nous avons été étonnées de ne pas être servies directement après nous être assises . Nous avions remarqué que la bière arrivait directement sur la table des convives lors de nos deux tentatives précédentes pour nous asseoir dans cette brasserie..
Quand je me suis décidée à héler timidement le serveur du mieux que je pouvais, celui-ci me répondit de loin avec un geste de la main que je n’ai pas compris. Je pensais qu’il m’avait envoyée magistralement bouler.
Heureusement le jeune tchèque à côté de nous, d’un geste beaucoup plus explicite de la main, nous mima la tirette de bière ! En réalité, le Tigre Doré brasse lui-même sa propre bière et le fût du bar était simplement en cours de remplissage !!!
Mea Culpa, je suis Parisienne, je ne bois la bière qu’à la bouteille.
Donc on a poireauté.
Le reste du service fut tout aussi nouveau pour nous. Un serveur est établi aux binouzes et ne s’occupe que de ça. Croyez-moi sur parole : il a l’oeil partout !
Il pose une pinte ( soit 0,5 L ) de bière sur un dessous de verre en carton estampillé U Zlatého Tygra puis note un trait sur une feuille de papier qui ne quittera pas votre table de la soirée.
DES QUE VOTRE CHOPE EST FINIE ou presque, le serveur surgit de nulle part, attrape votre verre vide et vous en pose un autre directement en notant son petit trait sur la feuille ! Autrement dit, votre verre ne sera jamais vide !
Nous nous demandions comment sortir de cette spirale infernale houblonnée quand nous vîmes nos jeunes voisins poser leur dessous de verre SUR le verre, sans doute un signe pour arrêter de remplir nos chopines. Doux Jésus, ça a marché ! ( mais finalement on l’a retiré 2 minutes plus tard, on avait encore soif ^^ )
Malgré leur aspect bourru et peu avenant , les serveurs s’avérèrent être d’une gentillesse rare envers les pauvres petites touristes que nous étions. Un petit sourire par ci par là nous réconfortait dans cet endroit où nous n’entravions pas un traître mot de ce qui se racontait autour. On peut y trouver de bons côtés en se foutant de la goule d’une personne mal fagotée, mais on comprend vite que si les autochtones se fendent la poire, c’est peut-être aussi à cause des deux étrangères qui ont dû se paumer.
Il faut noter également que malgré notre arrivée vers 17h et le creux de notre estomac s’agrandissant un peu plus à chaque gorgée de liquide bulleux, les cuisines commencent leur travail à partir de 19h30 et pas avant . On a donc compensé avec le houblon. Ca cale bien mine de rien ( mais ça fait gonfler le bide ).
On ne peut pas parler du Tigre Doré sans évoquer la bière Plzen brassée sur place. Sachez simplement que je suis loin d’être une fan de cette boisson…et pourtant, celle servie était tout simplement délicieuse : à bonne température, son goût est simplement exquis et il faut avouer qu’elle se boit comme du p’tit lait. Hips. C’est ma nouvelle meilleure chopine.
Toutefois, si vous ne tenez pas à goûter ce breuvage fait-maison, sachez que la brasserie propose aussi les bières ‘nationales’ comme la Pilsner Urquell.
Lorsqu’arriva le moment de commander, nous étions ravies de pouvoir lire la traduction anglaise des hiéroglyphes tchèques ( si vous voulez un aperçu du calvaire, rendez-vous sur le site ). Je décidais de manger léger….sauf qu’à cause d’une traduction approximative, j’ai failli m’en péter la panse.
Mon amie commanda une sorte d’énorme beignet fourré de pommes de terre et de porc….absolument divin…et pourtant je déteste le cochon ( oui ).
Quant à moi, je me contentais des traditionnels saucisse et fromage à bière, deux spécialités sensées accompagner divinement nos goulées. La saucisse maison servie chaude avec ses oignons était un pur délice. Quant au fromage, il me laissera un souvenir impérissable : j’adooore les fromages qui puent, les fromages qui dépotent et te laissent une haleine putride pendant des heures.
Et bien je fus servie : non seulement ce que je pensais être une simple tranche était en réalité un bloc énorme d’un fromage goûtu qui fait passer le Maroilles pour un vulgaire bout d’emmental.
Petite parenthèse : Inutile de préciser que j’ai abandonné l’idée de rouler une galoche à quiconque après avoir mangé, même au gros moche italien lubrique qui me fixait depuis des plombes à côté de moi. En fait , j’aurais pu, ça l’aurait sans doute calmé ^^ mais j’ai préféré glissé ma bague à mon annulaire gauche l’air de rien. Bonne technique, ça marche du tonnerre pour être peinard.
Malgré les prix ridiculement bas qui semblaient annonciateurs de petites portions , nos estomacs n’en pouvaient plus : la saucisse est bien passée, mais le porc et le fromage nous ont simplement achevées. Nous avions l’impression d’avoir pris 10kg dans les dents en un seul repas ! Mais quel repas ^^
Pour 20 euros environ, mon amie et moi totalisions :
- 4 litres de bières engloutis. Oui ca semble énorme. Mais visitez donc la République tchèque pour comprendre que l’eau est remplacée par ce breuvage avant de nous taxer d’alcooliques ^^
- un divin fromage qui pue et ses tranches de pain excellent
- une saucisse incomparable ( oh oui ) mais pas la petite chipo ridicule : la grosse saucisse entourée de ses petits oignons
- un plat de porc en beignet de patates absolument divin.
Mes petits conseils qui pourraient bien être utiles avant de penser aux victuailles :
- Si allergique au tabac , fuyez : l’endroit est entièrement fumeur, vous risquez d’y perdre un poumon ou deux.
- Si agoraphobe , évitez aussi : même si la station debout est interdite sauf pour les serveurs, les tables sont vraiment bondées.
- Pour éviter tout quiproquo avec un serveur et rester un minimum sobre, il faut poser son dessous de verre SUR sa chopine pour indiquer qu’on ne veut plus être resservi. On a vite fait de boire 20 litres de binouze sinon.
L’immersion dans la population tchèque est tout à fait plaisante malgré évidemment la sensation d’isolement que procure la barrière de la langue .
Ceci dit quand on en a un coup dans l’aile, elle se délie plus vite, la langue ( délier ma langue en tchèque, j’ai jamais pu ).
Je pense ne jamais retrouver une telle ambiance , un tel service et une bière aussi savoureuse en France ! Malgré nos airs de touristes, je dois dire que nous avons été fort bien accueillies puisque les serveurs bourrus se sont avérés être souriants et très doués en langage des signes.
Toutefois, pour vous figurer à quel point nous étions intimidées, je n’ai pas pu prendre de photos.
Intimidée. Moi. Oui.
D’habitude je mitraille, à l’U Zlatého Tygra l’appareil photo est resté bien calé au fond de mon sac à mains. J’ai déjà l’air d’une touriste, je vais pas en rajouter une couche hein.
Rendant honneur à l’expression «une bière t’en bois une, t’en pisses deux», j’ai eu l’occasion de visiter les wawas : im-pec-cables.
Le Petit Futé ne s’était pas trompé, cette brasserie est vraiment un incontournable de Prague.
L’endroit gagne vraiment à être connu mais une invasion de touristes serait certainement fort dommageable pour cet endroit qui se doit de garder son authenticité. Décoration typique , ambiance locale , houblon savoureux et nourriture goûtue , c’est la recette d’un endroit qui me botte !
Satisfaction : 10 / 10
0 Commentaires
lalutotale
9 mai 2013 9 h 17 minmerci Daniel ! Tu y es déjà allé dans cette brasserie donc? Ou ce sera ta première fois?
daniel
8 mai 2013 21 h 52 mincommentaire très bien rédigé!! spirituel, sincère et pertinent!
je suis un habitué de Prague et je suis sensible à ton commentaire!
et je te rassure, ce ne sont pas mes 4 mots de tcheque qui me sauvent (l’allemand si!!) et j’aurai une pensée émue dans 1 semaine quand je retournerai dans cette brasserie que tu as appréciée!!
merci pour ton commentaire pertinent, ton humour et ton style d’écriture dont je suis résolument aussi fan que la Beché et la Pivo!!
amitiés
daniel
Laisser un commentaire